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Lundi 7 mai 2012

Partir pour l'école fut difficile ce lundi. Difficile parce que la soirée du dimanche 6 mai a été mouvementée. Arrosage de la fin d'un quinquennat, du début d'un nouveau..., coucher tardif, trop tardif.

Alors ce lundi, entre dimanche et jour férié, ce fut réellement « compliqué » d'aller à l'école.

Un fois là pourtant, salle installée, élèves en place, tout reprend son cours. Mise à part ... la perception de l'immense désarroi d'une enfant ...

La relation dans un petit groupe de remédiation est toujours privilégiée. Les enfants se sentent sécurisés dans ce petit groupe sous le regard de l'enseignant et de leurs pairs confrontés comme eux à des difficultés qui freinent leurs apprentissages.

Quatre enfants.

Oguzhan vient de Turquie. Sa vie est difficile, partagé entre deux pays, deux cultures. Il s'est depuis longtemps enfermé dans un mutisme dont nous tentons sans relâche de l'aider à sortir .

Ismaïl, lui, n'a connu que la France. Motivé et volontaire, il s'évertue à acquérir les mots et les codes de ce pays qui est le sien mais pas encore complètement celui de ses parents qui n'en maîtrisent pas totalement la langue.

Youssouf, toujours souriant et prévenant envers ses camarades, souvent me parlait ces dernières semaines du risque de voir sa famille renvoyée au Mali.

Gaëlle, quant à elle, est française. Ses parents ne l'ont pas toujours été mais leurs origines sont européennes, moins lointaines.

Alors ce matin, l'émotion est forte dans notre petite salle du RASED où j'ai prévu de jouer avec les mots avec ce groupe: les mots du français écrit, ceux qu'on doit accorder, conjuguer, qu'il faut apprendre à maîtriser pour maîtriser ses apprentissages, son avenir, sa vie.

C'est Youssouf qui aborde le sujet des élections en annonçant avec un large sourire que François Hollande a gagné et, avec humour, que « Sarkozy ne va pas lui payer son voyage au Mali ». Ils sont tous informés de l'élection du nouveau Président. Oguzhan et Ismaïl ne disent rien. Gaëlle prend la parole doucement. Ses parents ont voté « Le Pen et Sarkozy », dans ses propres termes. J'en déduis que ce fut Marine le Pen au premier tour et Nicolas Sarkozy au second. Alors, moi, j'écoute et les laisse un moment s'exprimer. J'écoute et je comprends ou je crois comprendre; j'imagine les mots entendus à la maison de la bouche de ces parents que Gaëlle aime, entre les mains de qui elle est en confiance. Ces parents qui, sans doute, souhaite le départ des « étrangers ». Ses copains, elle les aime bien aussi. Alors pourquoi les gens qu'elle aime veulent voir partir des gens qu'elle aime aussi ?

Alors je comprends à quels conflits intérieurs elle est confrontée, j'imagine son désarroi et je comprends un peu mieux sa grande tristesse, ses difficultés à apprendre, à en apprendre davantage.

Il est temps de reprendre l'accord des noms et des adjectifs, la conjugaison des verbes... Pourquoi mettre un « s » au pluriel du nom et de l'adjectif alors qu'ils commandent un verbe qui lui, doit se terminer par « ent » ?

Tout cela paraît un instant... secondaire...

Tcitron,

 

Tag(s) : #Plaisir d'écrire